Surveiller la Mission suisse à Bruxelles
Votation populaire du 17 juin: Accords internationaux – la parole au peuple! La politique doit servir le pays et non pas des seigneurs étrangerspar Marianne Wüthrich, docteur en droit, Zurich Le 17 juin le peuple et les cantons voteront l’initiative populaire «Pour le renforcement des droits populaires dans la politique étrangère (accords internationaux: la parole au peuple!)» qui veut soumettre les accords importants avec l’étranger au référendum obligatoire (avec majorité du peuple et des cantons). Ce que savent probablement très peu de citoyens: Le DFAE (Département fédéral des Affaires étrangères) et d’autres parties de l’administration fédérale se sont incrustés à Bruxelles avec un appareil volumineux et prennent soin que dans toutes les domaines de la vie et du droit la Suisse s’adapte de plus en plus à l’UE. C’est aussi pour cette raison que nous avons besoin d’un référendum obligatoire en ce qui concerne les accords internationaux: Pour que le peuple suisse puisse mieux veiller à ce que font nos diplomates à Bruxelles. … que la Suisse ne s’éloigne pas trop de l’UELa Mission suisse auprès de l’UE à Bruxelles se trouve juste à côté du Parlement européen. Un coup d’œil sur le site du DFAE (www.eda.admin.ch) montre qu’en fait à cet endroit environ 40 diplomates et membres de l’administration fédérale «représentent les intérêts de la Suisse envers l’UE» – c’est-à-dire qu’ils font avancer le rattachement toujours plus étroit de la Suisse à l’UE. Ainsi il appartient aux tâches de la Mission de «coordonner et préparer les visites des membres de l’administration à Bruxelles». Mais qu’est-ce que les fonctionnaires suisses peuvent bien avoir à faire à Bruxelles? Les collaborateurs «participent aux pourparlers bilatéraux avec l’UE», ils «effectuent des travaux découlant des accords, coordonnent la participation de la Suisse aux programmes européens et participent aux rencontres d’experts de l’UE et des groupes de travail.» «Adaptation autonome, parce que nous le faisons de façon autonome» (porte parole Daniel Klingele d’après SWR2)D’accord, si «nous» signifiait le Parlement et le peuple. Mais loin de là: «Nous» qui changeons de façon «autonome» et continuelle le droit de l’UE en droit suisse, ce sont trois douzaines de zélateurs dans la Mission à Bruxelles qui s’assurent avec leur docilité un emploi bien doté. Et puis ils expliquent au Conseil fédéral, au Conseil national et au Conseil des Etats que c’est absolument nécessaire si nous ne voulons pas rater le train vers l’avenir – vers le pays de l’euro?! Reprise d’élaborations de l’UE, de préférence en dehors de notre système juridiqueDans la section Economie et Finances à Bruxelles, on s’occupe aussi de cohésion et de politique régionale: Cohésion de la Suisse avec l’UE? La politique régionale de l’UE est particulièrement appropriée pour mettre la Suisse sens dessus dessous, car ses instruments arrivent la plupart du temps par derrière, en dehors de notre système juridique et derrière le dos des citoyens: «Le concept d’aménagement du territoire suisse» avec ses régions métropolitaines qui sont des moyens pour détruire les Etats nations, les programmes Interreg pour la Regio Bodensee (lac de Constance) et autres «Clusters» inventés ignorant les frontières nationales – tout cela sans bases juridiques, partout des «processus participatifs» dans lesquels sera intégré un conseiller d’Etat par canton et un conseiller communal par commune, sans mandat correspondant du souverain. Ceci pour ne pas parler des Parcs naturels, privant les communes de leur souveraineté. Mais où en sont les cantons?Les cantons ne sont «représentés» dans la Mission suisse auprès de l’UE que par un seul homme de la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC) – une vraie farce! Les 26 cantons suisses, chacun un Etat membre souverain de la Confédération Suisse avec des compétences fédéralistes étendues, chacun unique avec sa propre variation culturelle et juridique – les cantons des villes et de la campagne, les cantons du plateau, dans les Alpes et dans le Jura, ceux à grande surface et beaucoup d’habitants, et les tout petits: Eux tous décident eux-mêmes de leurs affaires comme c’est écrit dans la Constitution fédérale. Il n’est pas question que l’équipe de l’administration fédérale à Bruxelles se mêle des compétences cantonales. Il n’est pas question non plus que la Conseillère fédérale Widmer-Schlumpf «discute» d’un changement des impôts sur les entreprises avec les supérieurs de l’UE. La seule chose qu’elle serait autorisée à dire lorsqu’elle ouvre la bouche à ce sujet est: «Je ne peux pas parler de ce sujet avec vous, car les impôts sur les entreprises se trouvent dans l’unique compétence des cantons suisses.» Pas de juges étrangersLa section «questions juridiques, Schengen» de la Mission est dirigée par Daniel Klingele, déjà cité ci-dessus qui – comme nous l’avons appris – considère comme sa tâche prioritaire de faire entrer le droit de l’UE dans notre système juridique. Apparemment pour se donner plus de prestige auprès des bureaucrates de l’UE, Monsieur Klingele a l’habitude de s’appeler «ministre» – un titre que nous ne connaissons pas en Suisse. Nos conseillers fédéraux ne sont pas des ministres, seulement des chefs de département et un diplomate du DFAE n’est très certainement pas un ministre. La section des questions juridiques s’occupe, à part la «collaboration policière et juridique» d’après Schengen /Dublin où, comme on le sait, plus rien ne fonctionne, aussi de «questions institutionnelles et juridiques générales de la Cour de justice de l’Union européenne». Politique extérieure et politique de sécurité d’après le commando de Bruxelles? Mais où sommes nous là, au juste?Ce qu’une section «Affaires politiques, sécurité et communication» cherche dans l’antichambre de Bruxelles reste dans l’ombre. ConclusionL’empressement exagéré, observé depuis des années, de la part de nos Conseillers fédéraux et de leurs diplomates à répondre à tous les souhaits de ces messieurs et dames de l’UE – voire de les devancer –, est contraire à leur mandat constitutionnel qui les oblige à s’engager en premier lieu pour les intérêts suisses. Qui dit «intérêts suisses» ne parle pas en premier lieu des intérêts des multinationales qui veulent multiplier leurs bénéfices en Suisse, mais des intérêts de la population suisse pour une Suisse économiquement stable, qui gère son budget et offre à ses habitants aussi à l’avenir le standard élevé de notre Etat social (au lieu de faire cadeau de milliards de francs à l’étranger), qui maintienne les intérêts de nos PME, leur importance pour notre place économique, les intérêts des nos jeunes qui veulent faire une formation professionnelle solide ou des études universitaires solides, afin d’être capables de prendre leur place en tant que citoyen professionnellement actifs et mères et pères de famille, l’intérêt de la majorité des Suisses pour le maintien de notre structure d’Etat fédéraliste et de démocratie directe, et de neutralité armée. La Mission suisse auprès de l’UE doit s’en tenir à ces prémisses, sinon elle doit être dissoute. L’argent qu’on épargnerait ainsi pourrait être versé à la Croix-Rouge suisse. • Source : horizons-et-debats. |